Un moment propice
La baisse des marchés, en premier lieu des valeurs technologiques américaines, n’est pas surprenante. Les investisseurs s’interrogent depuis un moment sur les valorisations. Le niveau de détention des actions américaines est élevé. Sur les trois derniers mois, les investisseurs étrangers ont acheté pour un total de 76,5 milliards de dollars d’actions américaines – un record. Il n’y avait plus d’acheteurs sur le marché. En outre, la forte concentration amplifie les mouvements de panique. Sur la plateforme Interactive Broker, populaire auprès des particuliers et des institutionnels aux États-Unis, Nvidia représentait 50% des volumes échangés en 2024. Une baisse, voire une correction si le mouvement actuel s’amplifie, était inévitable.
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Est-ce le « moment Sputnik » de l’IA ?
Le succès de DeepSeek, c’est de parvenir à faire aussi bien avec moins. Son modèle d’IA en open-source a nécessité un montant d’investissements 100 fois moins élevés que son équivalent américain Open AI, par exemple. Lorsque DeepSeek investit 1 dollar, une entreprise technologique américaine investit en moyenne 100 dollars. L’écart est massif. Cela s’explique par des logiciels plus puissants et plus efficaces, de meilleurs modèles d’architecture IA et des bases de données de meilleure qualité et plus grandes. Ce dernier point est crucial : il faut avoir accès à de vastes bases de données pour entraîner les algorithmes. Il n’y a pas de RGPD en Chine, ce qui permet un apprentissage sans contrainte et rapide des modèles…
Et maintenant ?
Les prochains jours, voire les prochaines semaines, vont être compliqués en bourse. Mais DeepSeek ne signe pas l’acte de décès de Nvidia et plus largement des valeurs technologiques américaines. Deux paradoxes sont importants dans l’IA. Le premier, c’est le paradoxe de Moravec, formalisé par le chercheur Hans Moravec dans les années 1980. Il peut se résumer à l’idée que « le plus difficile en robotique est souvent ce qui est le plus facile pour l’homme ». Le raisonnement nécessite très peu de calcul, à l’inverse des compétences sensorimotrices et de perception. Nvidia travaille justement sur le lien entre IA et robotique. Son PDG, Jensen Huang, l’a révélé en dévoilant sa dernière super-puce GB10 lors du CES qui s’est tenu à Las Vegas au début du mois. C’est la prochaine étape de développement de l’IA. Pour l’instant, aucune autre grande entreprise n’est aussi présente que Nvidia sur ce segment.
Le paradoxe de Jevons est le second paradoxe de l’IA. À mesure que la technologie devient plus efficace et accessible, une demande accrue peut entraîner une sensible hausse de la consommation de ressources essentielles au développement de l’IA, particulièrement les ressources énergétiques. Les investissements massifs des entreprises technologiques américaines dans l’énergie, notamment dans les énergies propres, n’ont pas vocation à diminuer. Au contraire, ils devraient augmenter sensiblement dans les années à venir, à l’image de ce que fait Amazon.