France : faut-il craindre une crise financière ?
Y a-t-il un risque de crise financière ?
La bonne nouvelle, c’est que ce risque est proche de zéro. Certes, nous empruntons plus cher que l’Allemagne, l’Espagne ou la Grèce mais à des taux qui sont toujours historiquement bas. Sur la dette de référence à 10 ans, nous empruntons proche de 3%, par exemple. C’est faible. L’an prochain, l’État français va devoir se refinancer à hauteur de 300 milliards d’euros – c’est énorme. Faut-il redouter un accident ? Non. Les taux d’emprunt devraient être contenus. Surtout, la demande de la part des investisseurs devrait toujours être élevée, ce qui montre l’attractivité de notre dette. Par exemple, lors d’une émission de dette du Trésor pour refinancer l’État ayant eu lieu au lendemain de la censure, la demande était trois fois supérieure à l’offre, signe indéniable que les investisseurs étrangers ont confiance dans la signature de la France.
Comment expliquer cela ?
Le contexte international est favorable : la désinflation est bien enclenchée partout et les taux baissent fortement en zone euro. Il est probable que les taux directeurs de la Banque Centrale Europe atteignent un plancher à 2% vers mi-2025, ce qui aura un effet positif sur les conditions d’emprunt. S’ajoutent à cela les spécificités propres au marché de la dette française. C’est une dette très liquide. Il y a toujours des vendeurs et des acheteurs pour s’assurer un fonctionnement normal du marché, même en période de crise. Elle offre un rendement attrayant, comme nous l’avons mentionné plus haut. Enfin, c’est une dette de bonne qualité puisqu’elle est bien notée par les agences de notation. Malgré les turpitudes politiques, cette situation n’est pas près de changer. Si vous détenez des obligations souveraines françaises dans votre assurance-vie, comme c’est souvent le cas, soyez rassuré, il n’y a aucun risque de défaut.
Une crise peut en cacher une autre
Maintenant, la mauvaise nouvelle. Une crise financière frappant la France est un scénario fantaisiste. Il a toutefois bien une crise, celle-ci est économique et elle va s’accélérer compte tenu de la gabegie politique dans laquelle nous sommes. C’est à peine caricatural : la France est à l’arrêt. Les consommateurs ne consomment plus. Le taux d’épargne est à un niveau record, à 18,2%. Ceux qui espéraient qu’il baisse un peu pour stimuler la croissance en 2025 vont être déçus. Il devrait rester quasiment inchangé.
Les entreprises n’investissent plus. Le pic d’investissement a été atteint au printemps dernier. Depuis, il ne cesse de baisser et cela va empirer dans les mois à venir. Pour 80% des entreprises, elles peuvent financer leurs investissements sans recours à l’emprunt. C’est énorme. Peu importe l’évolution des taux, elles peuvent en théorie investir. Mais elles ne vont pas le faire car elles ne savent pas ce qui les attend en termes de fiscalité dans les mois à venir. Cela va aussi avoir des effets négatifs sur le chômage. Le consensus des économistes s’attendait à ce que le taux de chômage rallie le seuil de 8% fin 2025. Cela pourrait survenir beaucoup plus rapidement que prévu.
Quant aux investisseurs étrangers, ils vont se détourner de la France. On ne peut pas les blâmer. Les conditions d’investissement sont désormais bien plus favorables en Espagne, si on souhaite comparer avec un autre pays européen, qu’en France. Ne parlons même pas de l’attractivité des États-Unis. Nous ne jouons pas dans la même cour.
Comment s’en sortir ?
Le poids de l’État dans l’économie doit diminuer. Il faut laisser respirer l’initiative privée. L’État ne doit pas disparaître. Mais il doit revoir son périmètre d’intervention. Est-ce le rôle de l’État de distribuer une aide financière pour faire rapiécer ses vêtements et ses chaussures ? Ne devrions-nous pas nous focaliser sur l’amélioration de l’enseignement des mathématiques à l’école où nous sommes bon dernier dans les comparaisons internationales ? Quand l’État souhaite tout régenter, on se retrouve avec une explosion des prélèvements obligatoires – donc une ponction de la richesse créée pour qu’elle soit (mal) redistribuée. En 2023, le taux des prélèvements obligatoires était de 45,6% du PIB en France – un record européen, contre 40,6% en moyenne dans la zone euro et 40,3% en Allemagne. Les impôts sur la production, qui ont pourtant baissé, sont encore deux fois supérieurs en France à la moyenne de la zone euro. L’écart est également important au niveau des cotisations sociales : 16,4% du PIB en France contre 14,6% en zone euro. Finalement, il n’y a qu’au niveau du poids de l’impôt sur les sociétés où nous faisons un peu mieux que l’Europe, à 2,9% du PIB contre 3,2% sur la moyenne européenne. C’est une maigre consolation.
Il faut aussi revoir notre modèle social
Si nous souhaitons sortir par le haut de la crise politique actuelle, il faut aussi revoir notre modèle social qui n’est plus finançable, notamment le système de retraites. Il n’y a que 1,67 actif cotisant pour chaque retraité à l’heure actuelle, contre 2,6 en 1990 et 2,02 en 2004. Un système de retraite par capitalisation s’impose – a minima pour garantir des retraites élevées dans les années et décennies à venir.
Est-ce que la classe politique aura le courage de prendre les bonnes décisions ? On peut malheureusement redouter que ce ne soit pas le cas, au regard du cirque politique qui nous a été donné depuis la dissolution. Mais que cela ne vous empêche toutefois pas de passer d’agréables fêtes de fin d’année. Nous nous retrouverons l’année prochaine !