« On ne peut pas s’empêcher de vieillir, mais on peut s’empêcher de devenir vieux », disait le peintre Henri Matisse (1869-1954). La vieillesse, loin d’être une défaite, est une victoire sur le temps. C’est vrai. Grâce à l’amélioration des soins, à l’avancée technologique et à des conditions de travail plus sûres, un enfant né aujourd’hui dans un pays occidental peut espérer vivre 14 ans plus longtemps qu’une personne née 50 ans auparavant. Ce phénomène ne se limite pas aux économies développées.
Ainsi, la Chine enregistre depuis les années 1960 une des plus fortes progressions de la longévité. Ses habitants vivent désormais près de 33 ans plus longtemps qu’à époque. Si la tendance actuelle se poursuit, l’ONU estime qu’en 2050 22% de l’humanité, soit 2 milliards d’individus, aura plus de 60 ans.
Faites une pause, c’est l’heure de l’édito de la CentaureNews
Aimer vieillir, vieillir mieux
Il y a encore quelques années de cela, il fallait lutter contre la vieillesse. On mettait en avant la nécessité de paraître jeune de façon plus ou moins naturelle. C’est toujours présent. Mais on accepte en même temps mieux la vieillesse et, surtout, on la voit comme une opportunité. Vieillir est même fun. Le cabinet de consulting McKinsey parle de « jeunes vieux » en référence à l’émergence d’un groupe démographique de seniors dynamiques, avec un certain patrimoine et profitant de la vie. Ils ont tendance à avoir une propension élevée à dépenser leur argent afin de faciliter leur quotidien et pour croquer la vie à pleine dents. Selon McKinsey, le marché des « jeunes seniors » pourrait faire croître l’économie mondiale de 12 000 milliards de dollars d’ici 2040 – soit une augmentation de 8% par rapport à aujourd’hui.
Il y a certainement un peu d’excès d’optimisme dans l’étude de McKinsey. On ne peut pas nier non plus que pour beaucoup de seniors la retraite est synonyme de perte importante de revenus et parfois de pauvreté. Mais elle a le mérite de souligner que le vieillissement est aussi synonyme d’opportunité économique et de développement de nouveaux besoins et d’innovations.
Aimer vieillir, vieillir mieux : Trois grands changements
Dans le secteur médical, d’abord. Les entreprises pharmaceutiques et les biotechs appréhendent désormais le vieillissement comme une maladie presque comme toutes les autres pour laquelle il est possible d’atténuer les symptômes. Cela permet le développement de nouveaux traitements médicamenteux liés au vieillissement ainsi que de technologies permettant de détecter, suivre et gérer les maladies courantes chez les seniors, comme le diabète et la démence. A plus long terme, on pourra peut-être un jour permettre la régénération de tissus complets et, grâce à l’intelligence artificielle, prolonger l’espérance de vie dans de bonnes conditions de plusieurs dizaines d’années. C’est ce qu’imagine le milliardaire Jim Mellon dans son ouvrage Juvenescence (2017).
L’industrie de la robotique et de l’automatisation est également pionnière pour régler les problèmes du quotidien propres au troisième âge. Cela implique de créer des robots spécialisés qui aident les personnes vulnérables à effectuer des tâches trop dures physiquement. C’est déjà rentré dans le quotidien au Japon avec les robots de ménage et de soin. Cela implique également de créer des robots pour pallier la baisse de main d’œuvre et pour aider les travailleurs vieillissants à assurer des tâches physiquement exténuantes voire pour tout simplement les remplacer pour les tâches répétitives et sans valeur ajoutée.
Aimer vieillir, vieillir mieux : L’immobilier est le dernier segment qui va être le plus impacté
L’immobilier est le dernier segment qui va être le plus impacté. Dans les pays développés et dans les grandes économies émergentes comme la Chine, le parc existant est de plus en plus modernisé afin de satisfaire les besoins de résidents plus âgés. Parallèlement, les logements dédiés aux personnes âgées et équipés de technologies facilitant la vie quotidienne des plus de 65 ans gagnent en notoriété dans les villes, en particulier en Europe. Le cabinet de consulting P&S Intelligence s’attend à ce que le marché des soins dans des maisons intelligentes explose dans le monde entier au cours de la prochaine décennie, passant de 9 milliards à 100 milliards de dollars à la fin de la décennie.
« Les personnes âgées demandent une palette de technologies intelligentes qui les aident à rester chez elles en gardant leur indépendance et leur dignité », écrit P&S dans un rapport en 2020. « L’augmentation de la demande d’équipements de suivi des patients, de prévention et de détection des chutes, le tout connecté à l’Internet des objets (IoT), facilite le développement dans le monde entier du marché des soins dans des maisons intelligentes ».
Aimer vieillir, vieillir mieux : Et l’épargnant dans tout cela ?
Comment capturer cette thématique qui a un bel avenir ? Il y a deux moyens principaux pour un épargnant.
Soit opter pour du stock-picking, c’est-à-dire sélectionner des entreprises en bourse qui sont positionnées sur la thématique du vieillissement. Avant qu’elle ne devienne un penny stock (une action sans valeur), le meilleur exemple était la société ORPEA. Heureusement, il y a des entreprises qui s’en sortent mieux comme NVIDIA Corp (semi-conducteurs), Rockwell Automation (robotique), Softbank (qui a une branche robotique avec le célèbre robot Pepper) mais aussi des biotechs, des croisiéristes (qui ont retrouvé de l’entrain en bourse depuis que la Covid est passée) etc. Il y a tout un champ des possibles. Pour un épargnant, ce n’est pas la solution la plus aisée, toutefois. Ça peut être difficile de s’y retrouver.
Opter pour des fonds thématiques
Soit opter pour des fonds thématiques. Cette typologie de fonds en actions a été inventée au milieu des années 1990 par Pictet AM, d’abord sur la thématique des biotechs. L’objectif est de capturer les grandes tendances structurelles qui façonnent l’économie à long terme. C’est le cas de la démographie, mais aussi de la transition climatique, du bien-être, de l’urbanisation ou du digital. Il est possible de se positionner directement sur un fonds « vieillissement » (quelques-uns existent) ou sur des fonds au thème plus large, comme la robotique ou les biotechs, mais qui intègre aussi dans sa construction la problématique du vieillissement de la population.
Pour savoir quel fonds sélectionner, il faut regarder la volatilité (plus elle sera basse, mieux ce sera), la performance sur la longue durée (au moins cinq ans), la performance face à un indice de référence (souvent le MSCI world) et le profil de l’équipe de gestion. Il n’est pas improbable que vous entendiez parler lors de votre recherche d’alpha. Dans le jargon, l’alpha permet d’apprécier si un fonds bat son indice de référence. Par exemple, si l’alpha est de 3, cela signifie que le fonds bat son indice de 3%. Si l’alpha est négatif, il vaut mieux passer son chemin…Tout cela doit vous permettre de faire le tri entre tous les acteurs présents sur le marché français.